Adaptations de Marivaux au cinéma - Ressource

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Biographie

Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, plus communément appelé Marivaux, né le 4 février 1688 à Paris où il est mort, presque oublié, le 12 février 1763, est un journaliste, auteur dramatique et romancier français.

D’une famille originaire de Normandie qui avait fourni plusieurs magistrats au parlement de cette province, son père Nicolas Carlet est fonctionnaire dans l’administration de la marine de sa naissance jusqu’en 1698. En 1698, ce dernier emmène sa famille s’installer à Riom où il vient d’être nommé directeur de la Monnaie, puis à Limoges. De sa mère, Marie-Anne Bullet, on sait peu de choses.

Il devient élève des Oratoriens de Riom. Sa famille est de petite noblesse. En 1710, il ambitionne de suivre la voie paternelle et entre en Faculté de droit à Paris. Après sa rencontre avec Fontenelle, cumulée à la fréquentation du salon de Madame Lambert, Marivaux repère les esprits modernes et s’initie à la préciosité mondaine. Son premier texte est le Père prudent et équitable, ou Crispin l’heureux fourbe en 1712. Il développe alors son observation critique, s’engage dans la bataille contre les classiques et s’essaye à de multiples genres : roman parodique, poème burlesque ou chronique journalistique. Le parodique est alors sa principale voie d’écriture. Loin de dénigrer les oeuvres classiques, il reprend cependant tout ce qui fait le patrimoine culturel des écrivains classiques et le travestit en œuvres originales et décalées par rapport à l’usage. On voit par exemple son Homère Travesti en 1716.

Ses œuvres sont signées de son nom, il est alors considéré comme un brillant moraliste, sorte de nouveau La Bruyère. Il se marie en 1718 avec Colombe Boulogne, celle-ci lui apporte une dot aisée. Il est ruiné par la banqueroute de Law en 1720, puis perd sa femme en 1723. Il doit alors travailler pour vivre. Sa raison d’être est toute trouvée dans le théâtre.

Son premier succès est Arlequin poli par l'amour en 1720. Il apprécie les Comédiens Italiens et collabore avec eux pour quelques pièces. Sa rencontre avec Silvia Baletti est marquante. Marivaux révolutionne la comédie théâtrale, genre qu’il expose au travers des deux Surprises de l’amour ou de La Double Inconstance. Ses comédies philosophiques surviennent. Elles sont placées dans des cadres utopiques à l’image de l'Île des esclaves en 1725 ou de la Nouvelle Colonie en 1729.

Il étudie ensuite les visages de l’existence sociale, de même que les travers des contemporains. Il conclut que la réalité qu’il observe est toujours plus complexe et fugitive que les cadres rigides dans lesquels on tente de l’enfermer. Sa grande œuvre romanesque est La Vie de Marianne dont la rédaction s’étend sur environ quinze ans (1726-1741). À partir de 1733, il fréquente le salon de Claudine de Tencin, qui devient pour lui une amie précieuse. Grâce à elle, il est élu à l’Académie française en 1742. Il ne compose plus alors que quelques pièces jouées uniquement à la Comédie-Française, avec des réflexions sur la langue française en elle-même. À sa mort d’une pleurésie, il laisse un testament avec un bien maigre héritage financier à sa fille.


 Le théâtre de Marivaux reprend la devise de la comédie castigat ridendo mores (c’est-à-dire corriger les mœurs par le rire) et construit une sorte de pont entre le théâtre traditionnel italien de la commedia dell'arte, et ses figures (notamment Arlequin) et un théâtre plus littéraire, plus proche des auteurs français et anglais.

Marivaux est considéré par certains comme le maître français du masque et du mensonge. Principal outil du mensonge, le langage est également le masque derrière lequel se cachent les personnages. Ceux-ci sont souvent de jeunes gens, terrorisés à l’idée d’entrer dans la vie et de dévoiler leurs sentiments. Leurs aventures psychologiques à la fois complexes et naïves se déroulent sous le regard des plus vieux (les parents) et des spectateurs qui se moquent dans un mélange d’indulgence et de méchanceté.

Voltaire considérait le théâtre de Marivaux comme étant d’une très grande finesse psychologique, et en disait : « Il pèse des œufs de mouche dans une balance en toile d’araignée. » Mais on peut aussi interpréter cette réplique comme une critique du théâtre de Marivaux qu’il juge futile et inintéressant : Voltaire en est en effet un grand rival et le critique dans son livre le Temple du goût.

Au XVIIIe siècle, le succès n’est jamais éclatant : les Comédiens Français et leur public ne l’apprécient pas, et le Théâtre-Italien reste une scène secondaire. D’autre part, Marivaux s’est toujours tenu à l’écart du clan des philosophes. Mais au XIXe siècle, le succès des comédies de Musset provoque une véritable résurrection de Marivaux. Il trouve alors un public enthousiaste qui trouve précisément très moderne la complexité qu’on lui reprochait de son temps.

1712 : Le Père prudent et équitable
 1720 : L'Amour et la Vérité  1720 : Arlequin poli par l'amour  1720 : Annibal , sa seule tragédie  1722 : La surprise de l'amour   1723 : La double inconstance   1724 : Le pPrince travesti  1724 : La fausse suivante ou Le fourbe puni  1724 : Le Dénouement imprévu  1725 : L'Île des esclaves  1725 : L'Héritier de village  1726 : Mahomet second (tragédie en prose inachevée)  1727 : L'Île de la raison ou Les petits hommes  1727 : La seconde surprise de l'amour   1728 : Le Triomphe de Plutus  1730 : Le Jeu de l'amour et du hasard  1731 : La Réunion des Amours  1732 : Le Triomphe de l'amour  1732 : Les Serments indiscrets  1732 : L'École des mères  1733 : L'Heureux Stratagème  1734 : La Méprise  1734 : Le Petit-Maître corrigé  1734 : Le Chemin de la fortune  1735 : La Mère confidente  1736 : Le Legs  1737 : Les fausses confidences  1738 : La joie imprévue  1739 : Les sincères  1740 : L'épreuve  1741 : La commère  1742 : La vie de Marianne  1744 : La dispute  1746 : Le préjugé vaincu  1750 : La colonie  1750 : La femme fidèle  1757 : Félicie  1757 : Les acteurs de bonne foi  1761 : La provinciale

La surprise de l'amour  1722

Après avoir été trahi par une femme, Lélio maudit les femmes et s’est retiré, avec Arlequin, son valet, dont l’histoire ressemble à la sienne, dans une sorte d’ermitage. Mais, dans leur solitude, les femmes manquent aux deux hommes, surtout Lélio, qui aime tout des femmes, jusqu’à leurs défauts, surtout leurs défauts, leur légèreté d’esprit, leur étourderie. Dans le château où ils se sont retirés, Jacqueline, la cuisinière de Lélio, est éprise de Pierre, le serviteur d’une jeune veuve du voisinage qui professe à l’endroit des hommes les mêmes sentiments que Lélio à l’endroit des femmes. Or, Pierre et Jacqueline, pour se marier, ont besoin du consentement et même d’une petite subvention de leurs maîtres. Bien obligés de se voir à cette occasion, Lélio et la comtesse se sont juré d’avance qu’ils ne s’aimeront pas. Un baron de leurs amis leur raconte alors l’histoire de Popilius avant de les enfermer dans un cercle en leur disant qu’ils n’en sortiront pas avant d’être amoureux l’un de l’autre. Lélio et la comtesse éclatent de rire, mais la semence est jetée dans leur cerveau : ils se rencontreront en cherchant à s’éviter, s’écriront des billets sous prétexte qu’il est inutile de se voir et qu’ils s’entendront mieux par écrit, mais faute de se comprendre, ils devront bien se voir pour s’expliquer. La comtesse a également auprès d’elle une femme de chambre rusée, Colombine, qui s’est jurée de rendre Arlequin amoureux, et qui s’amuse malignement des agitations de sa maîtresse et les augmente. Lorsque la comtesse perd un portrait, Lélio, qui le trouve, lui renvoie la boîte, prétendant qu’il n’a pas vu la miniature, mais, vérification faite, cette miniature se trouve sur son cœur, et c’est la marquise qui la trouve. Force leur est de convenir que la plaisanterie du cercle de Popilius a produit son effet, qu’ils sont bien et dûment amoureux l’un de l’autre. Maîtres et valets finissent donc par se marier.

La Surprise de l’amour est une comédie en trois actes et en prose de Marivaux représentée pour la première fois le 3 mai 1722 par les Comédiens italiens à l’Hôtel de Bourgogne.

Réticences d’un amour qui s’ignore ou qui se combat lui-même, aveux retardés par la pudeur, paroles qui démentent les sentiments, tels sont les traits charmants de cette comédie que Théophile Gautier estimait le chef-d’œuvre de Marivaux.

 La double inconstance  1723

Une jeune paysanne, Silvia, a été enlevée : elle est retenue dans le palais du prince car celui-ci l’aime, bien qu’elle soit déjà éprise d’un jeune homme de son village : Arlequin. Flaminia, une conseillère du prince, puis Trivelin tentent de rompre l’amour entre les deux jeunes gens. Contrairement à Trivelin, Flaminia réussit à gagner leur sympathie et leur confiance. Ainsi, Silvia lui avoue que, malgré son amour pour Arlequin, elle aime un officier du palais qui lui a rendu visite plusieurs fois. Mais, elle ignore qu’il s’agissait, en fait, du prince incognito. Peu à peu, les deux jeunes paysans se laissent séduire par la vie de château. Arlequin tombe amoureux de Flaminia et néglige un peu trop Silvia. Il ne reste plus au prince qu’à dévoiler sa véritable identité et tout se termine bien par deux mariages.

La Double Inconstance est une comédie en trois actes et en prose de Marivaux créée le 6 avril 1723 à l’Hôtel de Bourgogne par les Comédiens italiens.

1968 : Marcel Bluwal. Avec : Claude Brasseur, Jean-Pierre Cassel, Évelyne Dandry, Danièle Lebrun

 La fausse suivante  1724

Pour mettre à l’épreuve Lélio qu’elle doit épouser alors qu’ils ne se sont jamais vus, une jeune femme, "la demoiselle de Paris", se présente à lui déguisée en Chevalier. Ellee st aidé par ses deux valets, Trivelin et Frontin.

Lélio, dupé par le travestissement, se prend d’amitié pour le Chevalier et lui parle de sa nouvelle conquête : une tendre comtesse envers laquelle il s’est engagé. Ce Don Juan pragmatique doit choisir entre ses deux promises : la comtesse, riche, et la demoiselle de Paris, plus riche encore. Il choisirait la plus fortunée sans cas de conscience s’il n’était pas lié par un dédit avec la comtesse : rompre l’engagement serait perdre une somme considérable.

Une idée vient alors à Lélio : demander au Chevalier de séduire la Comtesse. Si celle-ci tombe sous le charme du jeune homme, Lélio emportera la demoiselle de Paris sans avoir à payer le dédit. Le Chevalier accepte le stratagème et continue de tromper Lélio.

Le plan fonctionne d’abord à merveille : la comtesse s’enflamme pour le prétendu Chevalier et se déprend de Lélio. Mais les serviteurs, dont Arlequin, le valet de Lelio, ont eu vent que le prétendu chevalier est une femme et ne parviennent pas longtemps à garder l’information secrète. "La demoiselle de Paris" doit dévoiler son sexe mais cherche toujours à cacher sa réelle identité. Elle se fait passer pour une soubrette et trouve un prétexte pour se faire remettre le fameux dédit.

Plus tard, elle déchirera le dédit devant la comtesse et Lélio, tous deux dépités d'apprendre qu’ils ont été trompés. Le coureur de dots qu'est Lélio se voit démystifié par l'une des deux femmes dont la fortune l'intéressait au plus haut point. Le cynique se trouve donc finalement confondu, bafoué, et puni de ses mensonges et de ses intrigues. La "demoiselle de Paris" révèle sa véritable identité et affirme son indépendance.

2000 : Benoît Jacquot, La fausse suivante. Avec : Isabelle Huppert (La comtesse), Sandrine Kiberlain (Le chevalier), Pierre Arditi (Trivelin), Mathieu Amalric (Lélio), Alexandre Soulié (Arlequin), Philippe Vieux (Frontin). 1h30.

Au théâtre :

1724 : représentée, pour la première fois, par les Comédiens italiens ordinaires du Roi le samedi 8 juillet 1724 au théâtre de l’Hôtel de Bourgogne.
 1957 : au Château de Gournay : Annie Girardot (le chevalier), Georges Descrières (Lélio), Yvonne Gaudeau (La Comtesse), Jean Meyer (Trivelin), Jean-Claude Arnaud (Frontin), Jean-Paul Roussillon (Arlequin).  1964 : Mise en scène de Roger Mollien au Théâtre National Populaire (Palais de Chaillot). Avec : Geneviève Page (Le Chevalier), Roger Mollien (Lélio), Danielle Volle (La Comtesse), Angelo Bardi (Arlequin), Georges Wilson (Trivelin), Jean Mondain (Frontin).  1985 : Mise en scène de Patrice Chéreau. Avec : Laurence Bourdil (Le Chevalier), Didier Sandre (Lélio), Jane Birkin (La Comtesse), Pierre Vial (Frontin), Michel Piccoli (Trivelin), Bernard Ballet (Arlequin).  1991 : Mise en scène de Jacques Lassalle à la Comédie-Française. Avec Muriel Mayette (Le Chevalier), Richard Fontana (Lélio), Geneviève Casile (La Comtesse), Alain Pralon (Trivelin), Gérard Giroudon (Arlequin), Jean-François Rémi (Frontin).  2000 : réalisé par Benoît Jacquot. Avec : Sandrine Kiberlain (le Chevalier), Mathieu Amalric (Lélio), Isabelle Huppert (la Comtesse), Pierre Arditi (Trivelin).

2010 : Mise en scène de Lambert Wilson au Théâtre des bouffes du Nord. Collaboration artistique : Cécile Guillemot, Lumière : Françoise Michel, Scénographie : Sylvie Olivé, Costumes Olivier Bériot. Avec : Anne Brochet (Le Chevalier), Christine Brücher (La Comtesse), Éric Guerin (Arlequin), Pierre Laplace (Frontin), Francis Leplay (Trivelin), Fabrice Michel (Lelio), Ann Queensberry (La Mère de la Comtesse).

La seconde surprise de l'amour  1727

La Marquise est une veuve qui, après avoir perdu son époux tendrement aimé juste un mois après l’avoir épousé, se dit inconsolable. Un pédant du nom d’Hortensius qu’elle a engagé pour lui lire Sénèque passe plus de temps à poursuivre Lisette, qui ne l’écoute guère, de ses plaisanteries pédantesques et raffinées. Un comte et un chevalier, tous deux amis du mari, auxquels elle ne peut leur refuser sa porte, viennent aussi quelquefois la voir. Lorsqu’on prétend que le comte, très empressé auprès de la comtesse, l’épousera, elle s’indigne de cette supposition. Quant au chevalier, un amour malheureux au cœur, il est décidé à pleurer à jamais l’infidélité de sa maîtresse Angélique. Lorsque Lisette l’engage, pour faire diversion, à épouser la marquise, il refuse. Lorsqu’elle apprend ce refus, Ia marquise est indignée, en apparence contre Lisette, qui l’a compromise en offrant sa main et en réalité contre le chevalier, qui l’a refusée. Se jurant d’assujettir le rebelle, elle y parvient et l’amène à ses pieds. Mais, dans cette poursuite acharnée, elle a oublié de conserver son propre cœur. Si le chevalier est conquis, elle l’est également, et elle finira par l’épouser.

La Seconde Surprise de l’amour est une comédie en trois actes et en prose de Marivaux représentée pour la première fois le 31 décembre 1727 par les comédiens ordinaires du roi au théâtre de la rue des Fossés Saint-Germain.

La Seconde Surprise de l’amour présente une intrigue assez analogue à celle de la première surprise de l’amour. Ici, c’est la marquise qui est au premier plan, et c’est dans l’évolution de ses sentiments que l’action se concentre. Réticences d’un amour qui s’ignore ou qui se combat lui-même, aveux retardés par la pudeur, paroles qui démentent les sentiments, tels sont les traits de cette comédie.
 

2008 : Mise en scène de Luc Bondy créée en 2007 captée par Vitold Krysinsky en mars 2008 au théâtre d'Angers. Avec : Clotilde Hesme (La Marquise), Micha Lescot (Le chevalier), Audrey Bonnet (Lisette), Roch Leibovici, Pascal Bongard, Roger Jendly. 2h05.

Hortensisus et Lisette

La marquise et le Chevalier

Mise en scène moderne et intemporelle avec pour décor unique une longue estacade sur pilotis flanquée de deux cabines balnéaire sombrement voilées qui s'éloignent ou se rapprochent au grès des émotions. Dans cette lumière humide et lagunaire, les acteurs sont dirigés sur le même mode : préciosité du souffle mais gestuelle lascive contemporaine. Clotilde Hesme, juchée sur ses talons, est une marquise errante, hurlant en silence, sonnée par une épreuve trop rude. Une femme incapable de goûter à la fin, la félicité de sa deuxième chance. Luc Bondy le cynique sape toute velleité future de monter un "marivaudage" qui finirait bien. (Emmanuelle Bouchez pour Télérama)


Le Jeu de l'amour et du hasard  1730

Le Jeu de l’amour et du hasard est une comédie en trois actes et en prose représentée pour la première fois le 23 janvier 1730 par les comédiens italiens à l’hôtel de Bourgogne.

Acte I : Silvia, fille de Monsieur Orgon, craint d’épouser, sans le connaître Dorante, le jeune homme que son père lui destine. Elle décide de se travestir et d’échanger son habit avec sa femme de chambre, Lisette. Elle espère ainsi pouvoir mieux observer son prétendant. Mais Dorante a eu la même idée et se présente chez Monsieur Orgon déguisé en un serviteur nommé Bourguignon, alors que son valet, Arlequin, se fait passer pour Dorante. Monsieur Orgon et son fils, Mario, sont seuls informés du travestissement des jeunes gens et décident de laisser ses chances au « jeu de l’amour et du hasard ».

Acte II : Dès la fin du premier acte et au cours de l’acte II, les rencontres entre maîtres et valets déguisés sont autant de surprises de l’amour et de quiproquos. En effet, Silvia et Dorante s’étonnent d’être sensibles aux charmes d’une personne d’un rang social inférieur. Lisette et Arlequin, de leur côté, s’émerveillent et profitent de leur pouvoir de séduction sur celui ou celle qu’ils prennent pour un maître ou une maîtresse. Lorsque Silvia apprend enfin de Dorante sa véritable identité, elle éprouve un vif soulagement. Toutefois, sans se dévoiler, elle décide de poursuivre le jeu à sa guise.

Acte III : Silvia veut en effet obtenir de Dorante qu’il lui donne une très haute preuve de son amour : elle aimerait l’amener à lui offrir le mariage alors qu’il la croit encore une femme de chambre. Aidée de son frère Mario qui pique la jalousie de Dorante, Silvia triomphe finalement de celui-ci et c’est seulement dans la dernière scène qu’elle lui révèle qui elle est. Arlequin et Lisette, eux aussi démasqués au dénouement se jurent, malgré leur déception, un amour éternel.

Tout en respectant les codes de bienséance de l’époque – les nobles finiront ensemble, et les « petites gens » de leur côté – Marivaux retourne, dans cette comédie au dialogue étincelant, l’ordre établi, trouble les préjugés et inverse les rapports maîtres-valets. Cette situation engendre complications et quiproquos, et ce sont finalement les femmes, avec les serviteurs, qui se sortent le mieux de cette situation. Ainsi, Lisette est la première à comprendre ce qui se passe, puis elle l’avoue tardivement à Arlequin. Bien après, Silvia se rend à son tour compte de la situation, mais sa fierté l’empêche de l’avouer tout de suite à Dorante. Après quelques problèmes, ce dernier, passablement déconcerté, parvient finalement à vaincre l’orgueil de Silvia.

Parmi les maîtres, Monsieur Orgon, le père de Silvia, est indulgent et malicieux, il guide le jeu de l’amour et du hasard, en parfaite complicité avec son fils Mario. D’abord opposée au mariage arrangé, sa fille Silvia s’y résoudra avec celui dont elle a mis à l’épreuve l’amour et la sincérité, Dorante, fils d’un ami de M. Orgon. Parmi les valets, Lisette, la femme de chambre de Silvia, se plaît à rivaliser avec sa maîtresse en endossant son habit et en séduisant Arlequin. Arlequin[1], valet de Dorante, s’amuse des déboires de son maître et de ses propres succès amoureux auprès de Lisette.

1976. Mise en scène de Jean-Paul Roussillon captée par Pierre Badel. Avec : Béatrice Agenin (Silvia), Simon Eine (Dorante), Jacques Toja (Mario), Michel Etcheverry (Orgon), Jean-Noël Sissia (un domestique), Patrice Kerbrat (Pasquin), Dominique Constanza (Lisette). 1h44.

2003 : Abdellatif Kechiche, L'esquive. Avec : Osman Elkharraz (Krimo), Sara Forestier (Lydia), Sabrina Ouazani (Frida), Hafet Ben-Ahmed (Fathi). 1h40.

Les fausses confidences  1737

Dorante, un jeune homme d’une famille honorablement connue se trouve ruiné. Un ancien valet, Dubois, qui est maintenant au service d’une jeune veuve, riche, bonne, sans vanité, entreprend de la lui faire épouser, le voyant épris de cette dame. Il engage Dorante à se faire présenter dans la maison en tant qu’intendant par M. Rémi, son oncle, qui est procureur de ladite dame.

Toute l’action est menée par Dubois, ayant organisé un stratagème redoutable pour rendre Araminte amoureuse de Dorante.

Araminte est bien disposée pour lui dès l’abord ; elle lui trouve l’air distingué : il est bien fait de sa personne, bien recommandé ; elle l'engage. Elle est en procès avec un comte qui l’épouserait volontiers pour mettre un terme à ce procès qu’il craint de perdre. Quant à elle, elle ne se sent aucune envie d’épouser le comte, et elle charge Dorante d’examiner ses papiers et de lui dire si elle a quelque chance de gagner. Dubois, qui survient pendant cette conversation, feint d’être étonné de voir Dorante.

M. Remi décide d’une union entre Marton et Dorante, celle-ci ayant hérité de quelque fortune. Bien que cette nouvelle ne fasse pas partie du stratagème de Dubois, elle sert bien leurs intérêts, puisqu’elle a pour but de rendre Araminte jalouse par la suite.

Araminte, qui se trouve seule avec Dubois, lui demande quelques renseignements sur son nouvel intendant. Dubois lui dit que c’est le plus honnête homme du monde, instruit, probe, distingué, mais qu’il a une folie en tête : il est amoureux. On lui a proposé plusieurs partis fort avantageux qu’il a tous refusés pour son fol amour.

Lorsque Araminte demande à Dubois s’il connaît la personne qui lui a inspiré cette passion, Dubois lui confie que c’est elle-même. Araminte est étonnée, mais touchée en même temps. Tout en se disant qu’elle ne devrait pas garder son intendant, elle ne peut se résoudre à le renvoyer tout de suite et décide d’attendre au moins un peu.

La mère d’Araminte, femme ambitieuse qui rêve de voir sa fille accéder au statut de comtesse a, de son côté, ordonné à Dorante de dire à celle-ci qu’elle perdra son procès, pour qu’elle n’ait d’autre choix que celui d’épouser le comte, mais Dorante lui conseille tout de même de plaider. Un portrait mystérieux est alors envoyé au domicile d’Araminte, celle-ci ouvre la boîte et découvre que c’est un portrait d’elle. On découvrira plus tard que ce portrait a été envoyé pour Dorante, il se jette alors à ses genoux, lui avoue son amour et lui demande pardon. Araminte lui pardonne.

Marton, ayant compris que Dorante ne s’intéresse nullement à elle, subtilise une lettre, sous les conseils de Dubois. Cette lettre, écrite par Dorante, à un destinataire imaginaire, fait part de sa passion pour Araminte et de son désir de la quitter, par honte de l’avoir offensé. Marton voit en cette lettre une vengeance idéale, et la fait lire au Comte. Cette lettre avait alors pour but de rendre publique la passion de Dorante. Dorante se présente ensuite pour faire ses adieux à Araminte, celle-ci finit par avouer à son intendant qu’elle l’aime. Il lui confesse alors que la plupart des rapports qu’on lui a faits étaient de fausses confidences, et que c’est Dubois qui a tout mené. Il n’y a de vrai que l’amour profond qu’il avait conçu pour Araminte. Elle lui pardonne tout en faveur de cet amour et de sa franchise, et ils conviennent de s’épouser

2010. Mise en scène de Didier Bezace au théâtre de la Commune d’Aubervilliers. Avec : Pierre Arditi (Dubois), Anouk Grinberg (Araminte), Robert Plagnol (Dorante), Alexandre Aubry (Arlequin), Christian Bouillette (monsieur Rémi), Jean-Yves Chatelais (Le comte), Isabelle Sadoyan (la mère), Marie Vialle (Marton). Scénographie : Jean Haas. Lumières : Dominique Fortin. Costumes : Cidalia Da Costa. 2h10.

La vie de Marianne  1728- 1742

Vers le milieu du XVIIe siècle, les passagers d’un carrosse qui fait route vers Bordeaux sont attaqués et tués par des voleurs, mais une petite fille de deux ou trois ans est épargnée et bientôt recueillie par le curé d’un village voisin et sa sœur qui la prénomment Marianne. Une douzaine d’années plus tard, elle accompagne à Paris sa mère adoptive qui meurt brutalement. Marianne se retrouve seule dans une auberge. Le père Saint-Vincent, un religieux dont elle a sollicité l’aide, la recommande à la bienveillance d’une de ses ouailles, Monsieur de Climal, qui la place chez Madame Dutour, une lingère. Il devient rapidement évident que Monsieur de Climal a sur sa protégée des vues bien plus amoureuses que charitables. Il lui offre de beaux habits que Marianne ne se sent pas l’envie de refuser, avant de finir par lui faire des aveux qu’elle refuse d’entendre. Elle a une altercation avec sa logeuse lorsque cette dernière s’aperçoit que Monsieur de Climal l’a fournie en linge qu’il a acheté ailleurs que chez elle. Craignant de perdre la pension de Marianne, Madame Dutour se réconcilie avec celle-ci, allant jusqu’à l’inciter à tirer le maximum de Monsieur de Climal.

Deuxième partie. Marianne, parée de ses habits neufs, se rend à la messe où elle fait grand effet. Elle attire notamment l’attention d’un jeune homme, Valville, qui, au sortir de la messe, manquera de la renverser avec sa voiture. Emmenée chez Valville pour y recevoir des soins, celle-ci refuse de lui avouer où elle habite de peur d’être humiliée. Monsieur de Climal, qui n’est autre que l’oncle de Valville, arrive sur ces entrefaites et apprend la relation qui commence à s’ébaucher entre son neveu et sa protégée. Marianne retournera chez Madame Dutour en carrosse (d'où la fameuse scène entre le cocher et Mme Dutour), mais Valville aura pris soin de le faire suivre par un domestique.

Troisième partie. Monsieur de Climal, venu rendre visite à Marianne chez Dutour, tente de discréditer son neveu avant de finir par proposer à la jeune fille de l’installer comme sa maîtresse. Valville survient justement à ce moment pour trouver Monsieur de Climal aux genoux de Marianne. Croyant qu’elle est sa maîtresse, Valville se retire laissant Marianne plus en colère que jamais contre Monsieur de Climal, qui finit, lui aussi, par s’en aller en déclarant qu’il l’abandonne à son sort. Marianne décide de retourner solliciter l’aide du père Saint-Vincent, toujours parée de ses habits neufs, pour lui montrer l’hypocrisie des desseins de Monsieur de Climal. Elle y trouve ce dernier déjà en train de plaider sa propre cause auprès du religieux et ne le convainc qu’à grand peine de sa bonne foi. Entrée, sur le chemin du retour chez Madame Dutour, dans une église pour prier, elle attire l’attention d’une religieuse qui l’amène à la prieure du couvent à qui elle fait le récit de ses malheurs. Une visiteuse de la prieure prend cœur à ses malheurs et s’engage à payer sa pension au couvent. Marianne fait envoyer tous ses vêtements à Monsieur de Climal par l’intermédiaire de Valville auquel elle envoie un billet avant de retourner au couvent où elle va désormais demeurer. Valville, qui a fini par retrouver sa trace, vient lui rendre visite.

Quatrième partie. Rendant visite à Marianne avec une de ses amies, Madame Dorsin, la bienfaitrice de Marianne, qui s’appelle Madame de Miran, évoque son fils qui ne veut plus se marier depuis qu’il a rencontré une jeune fille. Comprenant que le fils de Madame de Miran n’est autre que Valville, Marianne avoue toute la vérité à sa bienfaitrice qui lui demande de l’aider à convaincre son fils de se marier. Marianne s’exécute, lors d’une visite de Valville, qui consent à ce qu’on lui demande, mais Madame de Miran, toujours plus séduite par Marianne, comprend l’inutilité de ses efforts et finit par agréer les sentiments que son fils porte à la jeune orpheline.

Cinquième partie. À l’article de la mort, Monsieur de Climal réhabilite Marianne en se livrant à des aveux complets sur sa tentative de séduction de Marianne. Il lui lègue une rente de douze cents livres. Deux parentes de Madame de Miran venues pour l’occasion, Madame de Fare et sa fille Mademoiselle de Fare, apprennent, à cette occasion, les projets de mariage entre Valville et Marianne. Madame de Fare emmène Marianne à la campagne, accompagnée de Valville, où elle tombe par hasard sur Madame Dutour venue montrer de la toile à ces dames. Celle-ci révèle avec bonne foi et naïveté tout ce que Marianne, Madame de Miran et Valville n’avaient pas envie que la famille apprenne sur les origines de Marianne. Bien que Mademoiselle de Fare s’empresse de faire jurer à Favier de ne rien révéler de ce qu’elle a entendu, le mal est déjà fait.

Sixième partie. Favier a tout révélé de l’histoire de Marianne à Madame de Fare. De retour au couvent, Marianne avoue tout à Madame de Miran et reçoit une visite singulière d’une personne, qui se dit la parente de cette dernière, et lui demande de confirmer son histoire avant de s’en aller aussi curieusement. Marianne rapporte dans un billet l’incident à Miran qui l’envoie, le lendemain, chercher par une femme de chambre. En réalité il s’agit d’un enlèvement orchestré par la famille de Madame de Miran s’opposant à la mésalliance de Valville avec Marianne. Cette dernière est emmenée dans un autre couvent où elle raconte ses malheurs à la supérieure qui prend son parti. La famille donne à Marianne un après-midi pour décider entre épouser Monsieur Villot, leur protégé, ou prendre le voile. Pour gagner du temps, Marianne accepte de considérer l’idée du mariage et rencontre son promis qui s’avère être un lourd benêt imbu de sa personne. Marianne rencontre la famille assemblée autour de l’un de ses membres les plus éminents qui est ministre. Pendant que celui-ci parle, Madame de Miran et Valville arrivent soudainement.

Septième partie. À l’issue d’un long débat, le ministre se rend aux vertus de Marianne et tout s’arrange. Madame de Miran emmène Marianne dîner chez elle où elle lui montre son futur appartement. Lors du retour de Marianne à son couvent, ils assistent à l’évanouissement d’une belle pensionnaire du nom de Varthon. Marianne prend Varthon en amitié et commence à lui raconter son histoire, mais sans lui révéler que Valville est l’homme qui lui est promis. En réalité, ce dernier est tombé amoureux de Varthon lorsqu’elle s’est évanouie comme il était tombé amoureux de Marianne lors de sa chute devant son carrosse. Lorsque Marianne tombe malade, Valville vient rendre visite à Varthon qui, lorsqu’elle se plaint que son fiancé ne lui a écrit aucun billet, lui avoue avoir reçu de nombreuses visites de Valville et qu’elle l’aime. Elle lui montre, à l’appui de ceci, le billet que lui a adressé Valville après son évanouissement.

Huitième partie. Après avoir d’abord refusé de revoir Valville, Varthon finit par le rencontrer et lui pardonner, ne le trouvant plus si coupable et comprenant même la difficulté qu’il y a pour lui à aimer une fille « qui n’est rien et qui n’a rien ». Marianne se met en colère contre Varthon et, peu de temps après, reçoit une visite inattendue de Valville qui tente de dissimuler son désintérêt pour elle. Alors qu’elle est chez Madame de Miran, elle emmène Valville à l’écart et lui montre la lettre à Varthon après que celui-ci a fort maladroitement tenté de justifier les soi-disant retards dans leur mariage. Revenus en compagnie des autres, Valville est décontenancé lorsque sa mère évoque son mariage prochain et, lorsque Marianne demande l’abandon de ce projet, Madame de Miran s’emporte. L’embarras croissant de Varthon apprend bientôt à cette dernière et à Madame Dorsin qu’elle est la raison de la désaffection de Valville. Un riche officier qui a entendu parler des malheurs de Marianne s’en émeut et la demande en mariage, mais celle-ci commence à considérer l’idée d’entrer en religion. Marianne confie ce dilemme à Tervire, une religieuse devenue son amie et qui veut lui raconter sa propre histoire.

Dans les neuvième, dixième et onzième parties, Tervire raconte à Marianne l’histoire de Monsieur de Tervire, son père et Madame de Tresle, sa mère. Cette histoire en incise n’est aucunement reliée à celle de Marianne et le roman se termine sans que l’histoire soit jamais revenue à l’héroïne principale dont le titre apprend au lecteur qu’elle est comtesse, mais sans qu’on sache jamais si ce titre lui a été restitué à l’issue d’une reconnaissance ou si elle l’a acquis grâce à un mariage.

2000 : Benoît Jacquot, La vie de Marianne. Téléfilm avec : Virginie Ledoyen (Marianne), Melvil Poupaud (Valville), Sylvie Milhaud (Madame de Miran), Marcel Bozonnet (Monsieur de Climal), Nathalie Krebs (Madame Dorsin). 3h00.

 Les acteurs de bonne foi  1757

À l'occasion du mariage d'Éraste et Angélique, les valets sont appelés à jouer un petit divertissement impromptu orchestré par Merlin. Ces acteurs improvisés distinguent mal sentiments affectés et réalité. Parallèlement, pour son seul plaisir, Mme Amelin feint l'annulation du mariage pour s'amuser des réactions des autres protagonistes.

Mise en scène de Jean-Luc Boutté (1978) captée par François Chatel à la Comédie-Française : Dominique Rozan (Merlin) ; Alain Feydeau (le Notaire) ; Denise Gence (Mme Argante) ; Yvonne Gaudeau (Mme Amelin) ; Richard Berry (Eraste) ; Gérard Giroudon (Blaise) ; Bérengère Dautun (Araminte) ; Catherine Hiegel (Lisette) ; Dominique Constanza (Colette) ; Bernadette Le Saché (Angélique).

"Fais nous rire, on ne t'en demande pas davantage." Marivaux

Marivaudage : badinage spirituel et galant, manège de galanterie délicate. Les Acteurs de bonne foi sont l'une des pièces de Marivaux faisant exception à la règle du marivaudage. Réflexion acerbe sur le théâtre et l'âme humaine, cette comédie apparaît comme une œuvre testamentaire, le regard sans concession de Marivaux sur le théâtre : petit théâtre de la vie, petit théâtre de la cruauté. À la fin de sa vie, Marivaux se montre plus critique face à l'homme et ses faiblesses. Dans Les Acteurs de bonne foi, le jeu théâtral est prétexte à éprouver les sentiments et les réactions de certains protagonistes à leur insu. [...] Des thèmes chers à Marivaux sont évoqués : le travestissement de l'âme, l'argent et l'amour, l'injustice sociale, la confusion des sentimentsest la pièce de Marivaux la plus représentée à la Comédie-Française depuis 1802. "

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