Biographie
Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, plus communément appelé Marivaux, né le 4 février 1688 à Paris où il est mort, presque oublié, le 12 février 1763, est un journaliste, auteur dramatique et romancier français.
D’une famille originaire de Normandie qui avait fourni plusieurs magistrats au parlement de cette province, son père Nicolas Carlet est fonctionnaire dans l’administration de la marine de sa naissance jusqu’en 1698. En 1698, ce dernier emmène sa famille s’installer à Riom où il vient d’être nommé directeur de la Monnaie, puis à Limoges. De sa mère, Marie-Anne Bullet, on sait peu de choses.
Il devient élève des Oratoriens de Riom. Sa famille est de petite noblesse. En 1710, il ambitionne de suivre la voie paternelle et entre en Faculté de droit à Paris. Après sa rencontre avec Fontenelle, cumulée à la fréquentation du salon de Madame Lambert, Marivaux repère les esprits modernes et s’initie à la préciosité mondaine. Son premier texte est le Père prudent et équitable, ou Crispin l’heureux fourbe en 1712. Il développe alors son observation critique, s’engage dans la bataille contre les classiques et s’essaye à de multiples genres : roman parodique, poème burlesque ou chronique journalistique. Le parodique est alors sa principale voie d’écriture. Loin de dénigrer les oeuvres classiques, il reprend cependant tout ce qui fait le patrimoine culturel des écrivains classiques et le travestit en œuvres originales et décalées par rapport à l’usage. On voit par exemple son Homère Travesti en 1716.
Ses œuvres sont signées de son nom, il est alors considéré comme un brillant moraliste, sorte de nouveau La Bruyère. Il se marie en 1718 avec Colombe Boulogne, celle-ci lui apporte une dot aisée. Il est ruiné par la banqueroute de Law en 1720, puis perd sa femme en 1723. Il doit alors travailler pour vivre. Sa raison d’être est toute trouvée dans le théâtre.
Son premier succès est Arlequin poli par l'amour en 1720. Il apprécie les Comédiens Italiens et collabore avec eux pour quelques pièces. Sa rencontre avec Silvia Baletti est marquante. Marivaux révolutionne la comédie théâtrale, genre qu’il expose au travers des deux Surprises de l’amour ou de La Double Inconstance. Ses comédies philosophiques surviennent. Elles sont placées dans des cadres utopiques à l’image de l'Île des esclaves en 1725 ou de la Nouvelle Colonie en 1729.
Il étudie ensuite les visages de l’existence sociale, de même que les travers des contemporains. Il conclut que la réalité qu’il observe est toujours plus complexe et fugitive que les cadres rigides dans lesquels on tente de l’enfermer. Sa grande œuvre romanesque est La Vie de Marianne dont la rédaction s’étend sur environ quinze ans (1726-1741). À partir de 1733, il fréquente le salon de Claudine de Tencin, qui devient pour lui une amie précieuse. Grâce à elle, il est élu à l’Académie française en 1742. Il ne compose plus alors que quelques pièces jouées uniquement à la Comédie-Française, avec des réflexions sur la langue française en elle-même. À sa mort d’une pleurésie, il laisse un testament avec un bien maigre héritage financier à sa fille.
Le théâtre de Marivaux reprend la devise de la comédie castigat ridendo mores (c’est-à-dire corriger les mœurs par le rire) et construit une sorte de pont entre le théâtre traditionnel italien de la commedia dell'arte, et ses figures (notamment Arlequin) et un théâtre plus littéraire, plus proche des auteurs français et anglais.
Marivaux est considéré par certains comme le maître français du masque et du mensonge. Principal outil du mensonge, le langage est également le masque derrière lequel se cachent les personnages. Ceux-ci sont souvent de jeunes gens, terrorisés à l’idée d’entrer dans la vie et de dévoiler leurs sentiments. Leurs aventures psychologiques à la fois complexes et naïves se déroulent sous le regard des plus vieux (les parents) et des spectateurs qui se moquent dans un mélange d’indulgence et de méchanceté.
Voltaire considérait le théâtre de Marivaux comme étant d’une très grande finesse psychologique, et en disait : « Il pèse des œufs de mouche dans une balance en toile d’araignée. » Mais on peut aussi interpréter cette réplique comme une critique du théâtre de Marivaux qu’il juge futile et inintéressant : Voltaire en est en effet un grand rival et le critique dans son livre le Temple du goût.
Au XVIIIe siècle, le succès n’est jamais éclatant : les Comédiens Français et leur public ne l’apprécient pas, et le Théâtre-Italien reste une scène secondaire. D’autre part, Marivaux s’est toujours tenu à l’écart du clan des philosophes. Mais au XIXe siècle, le succès des comédies de Musset provoque une véritable résurrection de Marivaux. Il trouve alors un public enthousiaste qui trouve précisément très moderne la complexité qu’on lui reprochait de son temps.
1712 : Le Père prudent et équitable
1720 : L'Amour et la Vérité 1720 : Arlequin poli par l'amour 1720 : Annibal , sa seule tragédie 1722 : La surprise de l'amour 1723 : La double inconstance 1724 : Le pPrince travesti 1724 : La fausse suivante ou Le fourbe puni 1724 : Le Dénouement imprévu 1725 : L'Île des esclaves 1725 : L'Héritier de village 1726 : Mahomet second (tragédie en prose inachevée) 1727 : L'Île de la raison ou Les petits hommes 1727 : La seconde surprise de l'amour 1728 : Le Triomphe de Plutus 1730 : Le Jeu de l'amour et du hasard 1731 : La Réunion des Amours 1732 : Le Triomphe de l'amour 1732 : Les Serments indiscrets 1732 : L'École des mères 1733 : L'Heureux Stratagème 1734 : La Méprise 1734 : Le Petit-Maître corrigé 1734 : Le Chemin de la fortune 1735 : La Mère confidente 1736 : Le Legs 1737 : Les fausses confidences 1738 : La joie imprévue 1739 : Les sincères 1740 : L'épreuve 1741 : La commère 1742 : La vie de Marianne 1744 : La dispute 1746 : Le préjugé vaincu 1750 : La colonie 1750 : La femme fidèle 1757 : Félicie 1757 : Les acteurs de bonne foi 1761 : La provinciale
La surprise de l'amour 1722
Après avoir été trahi par une femme, Lélio maudit les femmes et s’est retiré, avec Arlequin, son valet, dont l’histoire ressemble à la sienne, dans une sorte d’ermitage. Mais, dans leur solitude, les femmes manquent aux deux hommes, surtout Lélio, qui aime tout des femmes, jusqu’à leurs défauts, surtout leurs défauts, leur légèreté d’esprit, leur étourderie. Dans le château où ils se sont retirés, Jacqueline, la cuisinière de Lélio, est éprise de Pierre, le serviteur d’une jeune veuve du voisinage qui professe à l’endroit des hommes les mêmes sentiments que Lélio à l’endroit des femmes. Or, Pierre et Jacqueline, pour se marier, ont besoin du consentement et même d’une petite subvention de leurs maîtres. Bien obligés de se voir à cette occasion, Lélio et la comtesse se sont juré d’avance qu’ils ne s’aimeront pas. Un baron de leurs amis leur raconte alors l’histoire de Popilius avant de les enfermer dans un cercle en leur disant qu’ils n’en sortiront pas avant d’être amoureux l’un de l’autre. Lélio et la comtesse éclatent de rire, mais la semence est jetée dans leur cerveau : ils se rencontreront en cherchant à s’éviter, s’écriront des billets sous prétexte qu’il est inutile de se voir et qu’ils s’entendront mieux par écrit, mais faute de se comprendre, ils devront bien se voir pour s’expliquer. La comtesse a également auprès d’elle une femme de chambre rusée, Colombine, qui s’est jurée de rendre Arlequin amoureux, et qui s’amuse malignement des agitations de sa maîtresse et les augmente. Lorsque la comtesse perd un portrait, Lélio, qui le trouve, lui renvoie la boîte, prétendant qu’il n’a pas vu la miniature, mais, vérification faite, cette miniature se trouve sur son cœur, et c’est la marquise qui la trouve. Force leur est de convenir que la plaisanterie du cercle de Popilius a produit son effet, qu’ils sont bien et dûment amoureux l’un de l’autre. Maîtres et valets finissent donc par se marier.
La Surprise de l’amour est une comédie en trois actes et en prose de Marivaux représentée pour la première fois le 3 mai 1722 par les Comédiens italiens à l’Hôtel de Bourgogne.
Réticences d’un amour qui s’ignore ou qui se combat lui-même, aveux retardés par la pudeur, paroles qui démentent les sentiments, tels sont les traits charmants de cette comédie que Théophile Gautier estimait le chef-d’œuvre de Marivaux.
La double inconstance 1723
Une jeune paysanne, Silvia, a été enlevée : elle est retenue dans le palais du prince car celui-ci l’aime, bien qu’elle soit déjà éprise d’un jeune homme de son village : Arlequin. Flaminia, une conseillère du prince, puis Trivelin tentent de rompre l’amour entre les deux jeunes gens. Contrairement à Trivelin, Flaminia réussit à gagner leur sympathie et leur confiance. Ainsi, Silvia lui avoue que, malgré son amour pour Arlequin, elle aime un officier du palais qui lui a rendu visite plusieurs fois. Mais, elle ignore qu’il s’agissait, en fait, du prince incognito. Peu à peu, les deux jeunes paysans se laissent séduire par la vie de château. Arlequin tombe amoureux de Flaminia et néglige un peu trop Silvia. Il ne reste plus au prince qu’à dévoiler sa véritable identité et tout se termine bien par deux mariages.
La Double Inconstance est une comédie en trois actes et en prose de Marivaux créée le 6 avril 1723 à l’Hôtel de Bourgogne par les Comédiens italiens.
1968 : Marcel Bluwal. Avec : Claude Brasseur, Jean-Pierre Cassel, Évelyne Dandry, Danièle Lebrun
La fausse suivante 1724
Pour mettre à l’épreuve Lélio qu’elle doit épouser alors qu’ils ne se sont jamais vus, une jeune femme, "la demoiselle de Paris", se présente à lui déguisée en Chevalier. Ellee st aidé par ses deux valets, Trivelin et Frontin.
Lélio, dupé par le travestissement, se prend d’amitié pour le Chevalier et lui parle de sa nouvelle conquête : une tendre comtesse envers laquelle il s’est engagé. Ce Don Juan pragmatique doit choisir entre ses deux promises : la comtesse, riche, et la demoiselle de Paris, plus riche encore. Il choisirait la plus fortunée sans cas de conscience s’il n’était pas lié par un dédit avec la comtesse : rompre l’engagement serait perdre une somme considérable.
Une idée vient alors à Lélio : demander au Chevalier de séduire la Comtesse. Si celle-ci tombe sous le charme du jeune homme, Lélio emportera la demoiselle de Paris sans avoir à payer le dédit. Le Chevalier accepte le stratagème et continue de tromper Lélio.
Le plan fonctionne d’abord à merveille : la comtesse s’enflamme pour le prétendu Chevalier et se déprend de Lélio. Mais les serviteurs, dont Arlequin, le valet de Lelio, ont eu vent que le prétendu chevalier est une femme et ne parviennent pas longtemps à garder l’information secrète. "La demoiselle de Paris" doit dévoiler son sexe mais cherche toujours à cacher sa réelle identité. Elle se fait passer pour une soubrette et trouve un prétexte pour se faire remettre le fameux dédit.
Plus tard, elle déchirera le dédit devant la comtesse et Lélio, tous deux dépités d'apprendre qu’ils ont été trompés. Le coureur de dots qu'est Lélio se voit démystifié par l'une des deux femmes dont la fortune l'intéressait au plus haut point. Le cynique se trouve donc finalement confondu, bafoué, et puni de ses mensonges et de ses intrigues. La "demoiselle de Paris" révèle sa véritable identité et affirme son indépendance.
2000 : Benoît Jacquot, La fausse suivante. Avec : Isabelle Huppert (La comtesse), Sandrine Kiberlain (Le chevalier), Pierre Arditi (Trivelin), Mathieu Amalric (Lélio), Alexandre Soulié (Arlequin), Philippe Vieux (Frontin). 1h30.
Les acteurs de bonne foi 1757
À l'occasion du mariage d'Éraste et Angélique, les valets sont appelés à jouer un petit divertissement impromptu orchestré par Merlin. Ces acteurs improvisés distinguent mal sentiments affectés et réalité. Parallèlement, pour son seul plaisir, Mme Amelin feint l'annulation du mariage pour s'amuser des réactions des autres protagonistes.
Mise en scène de Jean-Luc Boutté (1978) captée par François Chatel à la Comédie-Française : Dominique Rozan (Merlin) ; Alain Feydeau (le Notaire) ; Denise Gence (Mme Argante) ; Yvonne Gaudeau (Mme Amelin) ; Richard Berry (Eraste) ; Gérard Giroudon (Blaise) ; Bérengère Dautun (Araminte) ; Catherine Hiegel (Lisette) ; Dominique Constanza (Colette) ; Bernadette Le Saché (Angélique).
"Fais nous rire, on ne t'en demande pas davantage." Marivaux
Marivaudage : badinage spirituel et galant, manège de galanterie délicate. Les Acteurs de bonne foi sont l'une des pièces de Marivaux faisant exception à la règle du marivaudage. Réflexion acerbe sur le théâtre et l'âme humaine, cette comédie apparaît comme une œuvre testamentaire, le regard sans concession de Marivaux sur le théâtre : petit théâtre de la vie, petit théâtre de la cruauté. À la fin de sa vie, Marivaux se montre plus critique face à l'homme et ses faiblesses. Dans Les Acteurs de bonne foi, le jeu théâtral est prétexte à éprouver les sentiments et les réactions de certains protagonistes à leur insu. [...] Des thèmes chers à Marivaux sont évoqués : le travestissement de l'âme, l'argent et l'amour, l'injustice sociale, la confusion des sentimentsest la pièce de Marivaux la plus représentée à la Comédie-Française depuis 1802. "
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